L'accord de libre-échange apporte de la misère et de la pauvreté pour la population en Colombie

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Pour le moment, sept motivés font un voyage de solidarité en Colombie avec intal et Médecine pour le Tiers-Monde. Voici une interview passionante qu'ils ont eue avec le président de FENSUAGRO, Eberto Díaz, sur l'impact d'un accord de libre-échange avec l'Europe.

  Twee   Lors de la réunion d'accueil de la Brigada internacional juvenil por la paz de Colombia, Eberto Montes Díaz a prononcé un discours inspirant. En tant que président de FENSUAGRO, le plus grand syndicat des paysans colombiens, il a souligné l'importance de la réforme agraire en Colombie pour aboutir à la paix. Après la séance d'accueil, nous sommes allés le trouver pour une courte entrevue. Voici un bref résumé.

Intal: "Pouvez-vous nous présenter votre organisation ?"

Eberto: "FENSUAGRO défend les droits des paysans et des ouvriers agricoles de la Colombie et les soutient dans leur lutte pour la réforme agraire. Notre organisation défend les droits de l'homme, le droit à l'eau, à la santé et l'amélioration des conditions de vie en général. Pour y parvenir, nous préconisons une forte souveraineté nationale afin que le peuple colombien puisse maitriser son avenir. Nous nous battons pour une politique agricole qui permette aux paysans et aux travailleurs agricoles de vivre sur leur propre terre, en harmonie avec l'environnement."

Intal: "Pourquoi pensez-vous qu'il est important d'être ici ?"

Eberto: "FENSUAGRO est fortement impliqué dans la lutte pour la paix et les droits humains. Dans ce contexte, nous ne pouvons pas manquer à cette conférence internationale de la jeunesse pour la paix en Colombie. Par ailleurs, dans cette région, le conflit armé et social est très palpable à travers la forte militarisation. Il est de notre devoir social, moral et politique d'être présent ici en tant que syndicat. La jeunesse est l'avenir et a le pouvoir de réaliser la paix dans ce pays. En s’unissant et en s’organisant lors de cette conférence, les jeunes apprennent à résister à la police, à l'armée, aux paramilitaires ou à la guérilla. La jeunesse a besoin d'étude et de détente. En étudiant ici et en apprenant les uns des autres, ils découvrent le chemin de la défense de leur pays, le chemin de la lutte et le chemin de la paix ".

Intal: "Quelles sont selon FENSUAGRO les plus grandes menaces posées par le TLC (Tratado de Libre Commercio = Traité de Libre-Echange) ? "

Eberto: "Nous voyons des implications qui en découlent dans divers domaines.

Tout d'abord, le TLC a un grand impact en termes économiques. Nous vivons aujourd’hui une crise très profonde, de nombreuses petites et moyennes entreprises ont du mal à survivre. Très concrètement, le TLC représente une menace pour les 600.000 familles de producteurs laitiers qui ne seront pas en mesure de rivaliser avec les producteurs européens. Le TLC va donc mener à un chômage massif avec un effet domino. Non seulement les producteurs de lait sont menacés, mais aussi des producteurs de riz, le maïs, de soja et d'autres cultures vivrières. Donc, nous allons à une dépendance encore plus grande par des importations massives de produits agricoles. Ces importations massives sont une menace pour la souveraineté alimentaire colombienne. En outre, l'importation des OGM, comme le maïs et les pommes de terre des États-Unis sont une menace pour la santé publique.

Deuxièmement, le TLC aura également des conséquences très négatives sur le plan politique. Pour avaliser cet accord de libre-échange, il faudrait changer la Constitution colombienne. À l'heure actuelle, un accord de libre-échange est déjà conclu entre la Colombie et les Etats-Unis. Cet accord négocié a conduit à une modification de la Constitution en faveur des multinationales comme McDonalds, Cargill, Monsanto, ... Ce sont des exemples de l'industrie agroalimentaire, mais il en va de même pour les entreprises dans le secteur financier. Ils s'enrichissent toujours plus à travers l'intégration et la transaction de capital.

La troisième conséquence du TLC, c'est qu'il va certainement contribuer à un renforcement du trafic de drogue. Le seul produit viable et rentable dans une zone de libre-échange s’appelle cocaïne. Les paysans ne seront plus motivés à se développer dans la production de yucca ou de bananes car ils ne peuvent être compétitifs avec ces produits. Donc, la cocaïne est la seule alternative qui leur permettra de se maintenir.

En outre, le TLC a également une forte influence sur l'extraction des matières premières. Les grandes sociétés minières s'installent en Colombie et s'emparent des terres. Ils extraient le pétrole, l'or, le charbon, le nickel, l'uranium et l'eau. Non seulement ils s’accaparent les terres, mais ils polluent aussi le sol. Ils apportent la misère et la pauvreté parmi les communautés agricoles et une grande majorité de la population urbaine ".

Interview fait par Ilse et Roeland (membres de l'organisation intal), dont vous pouvez suivre les aventures sur leur blog du voyage "Intal dans le Sud" et www.intal.be